Mme Saez Cécile au centre en rouge et blanc
Mobiprox : bonjour Cécile. Le CHU de Bordeaux a été l’un des premiers de France à lancer un plan de mobilité. Concrètement, cela consiste en quoi ?
Cécile Saez : Le CHU de Bordeaux s’est en effet engagé dans une politique de développement durable il y a déjà treize ans. A vrai dire, à l’origine, le but était simplement de répondre à des problématiques d’accessibilité sur l’un des sites du CHU. Mais en questionnant nos professionnels de santé, l’idée a émergé de travailler sur la mise en place d’une politique de développement durable au sens large du terme et l’élaboration d’un plan de mobilité. Entendez par là un plan d’actions couvrant en fait différentes cibles.
MB : Lesquelles ?
CS : Quand on monte un tel plan, la principale action vise le trajet domicile-travail des 15.000 professionnels du CHU et même des 2.000 étudiants de santé qui se répartissent sur trois implantations. Mais cela concerne aussi les trajets inter-sites. Car en réalité le CHU de Bordeaux compte sept sites répartis sur toute la métropole. Certains professionnels sont donc amenés à se déplacer d’un site à l’autre quand ils travaillent en transversal, les établissements de santé étant structurés en pôles en lien avec des spécialités (cancérologie, chirurgie, pédiatrie…). Cela inclut aussi les cadres supérieurs dont les réunions peuvent avoir lieu sur différents sites. Enfin, nous intégrons bien sûr les patients et les usagers de l’hôpital dans la démarche, notamment lorsque notre partenariat avec la métropole conduit à améliorer la desserte en transports en commun. Ainsi, le plan bénéficie-t-il à tous : personnels et usagers.
MB : Pour quel bilan ?
CS : Nous faisons des enquêtes tous les quatre ans pour réajuster les actions en fonction de l’évolution des pratiques. Il en ressort que nous sommes passés de 75% de trajets en voiture individuelle accomplis par les pros en 2008 à 56% en février 2020. C’est certes du déclaratif, mais cela donne une idée de l’évolution significative de la part des modes alternatifs. Cela démontre que nos actions portent leurs fruits.
MB : Ceux qui délaissent la voiture, c’est au profit de quel mode de transport ?
CS : Le transport en commun est en augmentation grâce aux dessertes améliorées, mais nous assistons à une évolution très forte du vélo dont la part atteint 14%.C’est important. Nous commençons aussi à percevoir une petite frange de nouvelles mobilités, mais non chiffrée encore, puisque notre dernière enquête remonte à plus de deux ans. Or, ces pratiques n’ont véritablement explosé que depuis l’épisode Covid. Mais il est clair que je suis de plus en plus sollicitée par nos pros ou les cadres, notamment sur les questions du stationnement des trottinettes et leur recharge. Autant de sujets qui émergent mais pour lesquels nous n’avons pas encore apporté de solution. Il va falloir qu’on s’adapte et qu’ils soient intégrés au prochain plan de mobilité. Il y a en tout cas de notre part une vraie volonté d’intégrer et inclure les nouvelles mobilités dans nos prochains projets immobiliers, qu’il s’agisse de stationnement des trottinettes, des vélos électriques, des vélos cargo, des bornes électriques des véhicules… Nous sommes sollicités sur tout ! Il faut poursuivre notre travail pour améliorer les conditions d’accueil sur les sites du CHU et la qualité de vie au travail des professionnels.
MB : Votre CHU a bénéficié plusieurs fois du programme Mobiprox, quels bénéfices en avez-vous retenu ?
CS : Le but était de sensibiliser les professionnels du CHU à la sécurité de leur trajet. Cela a permis à ceux qui le souhaitaient de se tester sur simulateur grâce au partenaire M-Wheel qui propose pas mal de choses autour de la trottinette. Notamment un sujet formation avec des ateliers de sensibilisation à la pratique des nouvelles mobilités (trottinette, monoroue, tous les nouveaux engins, etc.), les questions d’assurance (obligatoire pour la trottinette électrique, faut-il le rappeler), mais surtout la prévention du risque (port du casque, respect règles du code, cohabitation avec les autres usagers). A propos de risque autour des nouvelles mobilités, on le voit bien aux urgences. Nous avons ainsi en projet de mettre en relation M-Wheel et les urgentistes du CHU afin qu’ils puissent travailler sur ces situations accidentogènes et adapter leur programme de formation.
MB : Un message à faire passer ?
CS : Nous avons été ravis de pouvoir bénéficier du programme Mobiprox. Il nous a permis de mener une action auprès du CHU que l’on n’aurait pas forcément accomplie autrement. C’est une réelle plus-value. J’invite tous les employeurs à faire de même, les collectivités, les écoles où on a déjà le savoir-nager, le savoir-rouler à vélo. Alors, pourquoi pas élargir à la trottinette ? La nouvelle génération d’enfants va vivre avec, elle va se saisir de cet outil là mais il est indispensable de proposer un accompagnement. Il y a donc matière à développer les choses et à sensibiliser fortement sur ces sujets de cohabitation notamment.
Article rédigé par Pascal Pennec.