Alexandre Fassi : Secrétaire général de Cap au Nord Entreprendre à Marseille

Ce mois-ci, Mobiprox donne la parole à un acteur engagé pour l’essor des mobilités douces dans son territoire.

Mobiprox : Présentez-nous votre organisation.

Alexandre Fassi : Cap au Nord Entreprendre (CANE) est un réseau d’entreprises qui fédère des acteurs économiques sur un territoire, celui du nord de la ville de Marseille : les 13e, 14e, 15e et 16e arrondissements, allant du littoral à Château-Gombert. Ce secteur constitue le poumon économique de la métropole Aix-Marseille-Provence, avec la présence d’acteurs stratégiques comme la Snef, Haribo, le grand port maritime, etc., tous faisant partie de nos adhérents. En ajoutant les professions libérales, les commerçants, ce sont 4.500 entreprises employant 85.000 personnes, et même 102.000 avec le port. Notre objectif est de développer l’attractivité globale du territoire, qu’il s’agisse de relations humaines, emploi, cadre de vie, voierie, impact environnemental ou mobilité. Celle-ci est même devenue une grande priorité étant donnée notre situation à l’extérieur du centre urbain. Nous avons peu de transports en commun (les deux lignes de métro s’arrêtent à Capitaine-Gèze et à La Rose), d’où certaines difficultés pour les salariés à se rendre sur leur lieu de travail : 90% viennent seuls en voiture.

MB : Lutter contre cet autosolisme constitue pour vous un enjeu majeur ?

AF : Pour les 85.000 personnes qui viennent travailler, auxquels s’ajoutent les clients, fournisseurs et habitants, il était naturel d’essayer de voir comment faciliter leurs déplacements compte tenu de deux grands éléments à prendre en compte. D’une part, l’absence de solutions alternatives par rapport à la voiture individuelle, constituant de surcroît un vrai handicap pour les demandeurs d’emploi sans solution de transport ; d’autre part, une réelle problématique culturelle : les gens se déplacent seuls en voiture ‘parce que ci, parce que ça’. A nous de trouver des solutions, de réfléchir autrement avec nos entreprises, d’expérimenter, d’inciter à de nouvelles pratiques, parce qu’il y a des ZFE qui arrivent, les enjeux de pollution, de foncier (on ne peut pas construire que des parkings), les problèmes de congestion. Il faut donc penser le coup d’après.

MB : Et c’est ainsi qu’a émergé la solution Mobiprox ?

AF : Dès 2016, nous avons imaginé différentes solutions : transport en micro-navettes depuis les terminus des métros, transport à la demande avec des entreprises d’insertion, puis est venue s’ajouter naturellement la question des modes de déplacement doux avec la FP2M (Fédération des professionnels de la micro-mobilité) qui a aussi une vocation très B to B. Son président Fabrice Furlan a identifié ce territoire comme potentiellement pilote.

MB : Concrètement ?

AF : Grâce à Mobiprox, nous nous sommes dit qu’on allait travailler avec nos acteurs économiques autour de la sensibilisation à la pratique du vélo et de la trottinette. Cela revient à organiser des journées de formation auprès des entreprises et leurs salariés, et à proposer des solutions connectées à l’ensemble de celles proposées par les prestataires du territoire issus de la FP2M, notamment Plume Mobility. De plus, Mobiprox représente un levier important pour aller chercher d’autres opérateurs comme la métropole Aix-Marseille-Provence. D’une part pour améliorer les infrastructures, car dans le nord de la ville la chaussée n’est pas terrible, pas plus que pistes cyclables sont adaptées à la trottinette. D’autre part, pour que la Métropole soit partie prenante de cette dynamique en participant à l’achat des flottes. Nous sommes allés les voir avec la FP2M et nous sommes mis d’accord sur des pratiques tarifaires avantageuses à destination de ces ‘nouveaux héros du quotidien’. Ainsi, dès qu’une entreprise fait appel à Mobiprox, qui contribue à hauteur de 20%, la Métropole suit à hauteur de 40%.

MB : Vous avez déjà pu mesurer l’impact sur les déplacements ?

AF : Nous avons lancé le programme en avril, c’est donc trop tôt. Par contre, nous avons déjà une bonne dizaine d’entreprises qui sont intéressées, et pas que les plus petites. Leur profil est très hétérogène : nous venons de travailler avec une TPE d’une dizaine de collaborateurs qui a pris deux vélos, nous allons travailler avec le chantier naval de Marseille ou avec des entreprises C2E comme Sonergia. Il y a un vrai intérêt entre la reconnaissance d’un acteur de terrain comme nous, qui a une identité forte sur le sujet mobilité, et l’expertise que peut apporter la FP2M avec la solution adaptée : c’est un vrai coup d’accélérateur.

MB : Un message à destination des entreprises qui hésitent encore ?

AF : Quand des experts se mobilisent pour inciter à de nouvelles pratiques, prenez le train en marche ! Car si l’on veut construire les mobilités de demain au service des entreprises pour qu’elles soient le plus attractives possible, il ne faut pas rester dans le wagon. Aujourd’hui, le partenariat entre CANE et FP2M autour de Mobiprox doit servir à ça : générer une confiance maximale pour permettre aux entreprises d’être locomotives : c’est vraiment le vecteur du changement en termes de pratique environnementale et en termes de déplacement.

Article rédigé par Pascal Pennec.